FPInnovations a récemment lancé l’édition 2019 du Canadian CLT Handbook (version française bientôt disponible), une version entièrement révisée qui vise à refléter les changements apportés depuis l’édition 2011 aux codes et normes du Canada et à favoriser une plus grande utilisation du bois lamellé-croisé (CLT).
Au-delà de l’aspect scientifique, FPInnovations a voulu partager l’opinion de David Moses*, ingénieur en structures au sein de la firme Moses Structural Engineers, et qui a à son actif de nombreux projets en CLT. Voici ce qu’il avait à dire…
FPI : Qu’est-ce qui vous a d’abord motivé à utiliser le bois, et en particulier CLT?
DM : J’ai été initié au travail du bois à l’école secondaire par un très bon professeur¾il insistait sur le travail artisanal, la reconnaissance des qualités matérielles du bois et l’utilisation d’outils manuels traditionnels de partout dans le monde. Le grain, la sensation et l’adaptabilité du bois m’ont plu. Je n’ai pas réalisé qu’on pouvait concevoir de grands bâtiments en bois avant d’obtenir mon diplôme d’ingénierie. À ce moment, la technologie évoluait rapidement en matière d’assemblage, de fabrication et de modélisation. Le CLT s’imposait comme la prochaine étape de choix : ce nouveau produit offre une grande résistance, permet une précision de coupe et s’installe rapidement.
FPI : Comment les gens ont-ils perçu ce changement? Quelle était la réaction des clients/occupants à la présence du bois dans leur environnement?
DM : D’abord, la conception et la construction en bois étaient un secteur de niche. Trouver les bons clients qui partageaient notre passion pour ces structures n’était pas simple et variait selon la localisation géographique. Mais maintenant, l’attitude des gens change et on note une meilleure compréhension des avantages découlant de l’utilisation du bois dans leur bâtiment, qu’il s’agisse d’esthétisme, de biophilie ou d’environnement.
FPI : Quels ont été les principaux obstacles de la part de vos clients lorsque vous proposiez des projets en bois?
DM : Comme pour tout produit structural, on se fait habituellement poser des questions sur la chaîne d’approvisionnement, l’échéancier, les coûts et la performance. Les nouveaux produits de construction comme le CLT prennent du temps à pénétrer les marchés. J’ai souvent vécu cette situation dans ma carrière – il faut compter environ 10 ans pour qu’un marché accepte un nouveau produit; beaucoup de gens veulent être le deuxième ou le troisième utilisateur d’un nouveau produit.
FPI : L’édition 2019 du manuel comprend un nouveau chapitre, Exemples de calculs, dont vous êtes un des auteurs principaux. Comme en êtes-vous venu à vous associer à ce projet? Quelle est la valeur ajoutée d’un tel chapitre?
DM : J’ai eu la chance de participer à la construction du premier bâtiment en CLT du Canada, et ce, avant même qu’il y ait des normes ou modifications aux codes de construction. Nous avons dû travailler et étudier tous les documents de recherche d’autres pays que nous pouvions trouver. De là, j’ai été amené à travailler avec FPInnovations et le Conseil canadien du bois à l’élaboration d’un cours sur la conception en CLT, qui a été présenté dans les principales villes canadiennes. Une fois publiée la première édition du manuel, les professionnels ont pu approfondir leurs connaissances sur la conception en CLT. Naturellement, l’étape suivante était d’offrir un exemple pratique d’un bâtiment en bois de grande hauteur pour rendre la technologie plus facilement accessible aux concepteurs.
FPI : Pourquoi les professionnels devraient-ils se procurer un exemplaire du manuel et l’utiliser dans leurs projets?
DM : Le manuel couvre tous les aspects et est une ressource essentielle pour toute personne qui envisage un premier projet en CLT. Ces professionnels s’y référeront à nouveau pour leur deuxième, troisième et quatrième projet, qu’ils soient d’Amérique du Nord ou d’ailleurs dans le monde.
FPI : Au cours des dernières années, de nombreux projets de construction d’importance utilisant le bois ont vu le jour au Canada. Croyez-vous que cette tendance va durer? Comment le manuel peut-il faire une différence à cet égard?
DM : L’intérêt pour les projets majeurs est beaucoup plus grand que par le passé. Cet intérêt va se maintenir, d’autant plus que la chaîne d’approvisionnement augmentera l’offre de produits et que les gouvernements chercheront des moyens d’encourager les réductions de carbone atmosphérique et de promouvoir leur industrie forestière locale. Le manuel est une ressource de premier ordre pour les concepteurs en leur permettant de répondre à de nombreuses questions posées par les propriétaires de bâtiments. Grâce à des connaissances supplémentaires, la notion de risque devrait diminuer tandis que l’acceptation des marchés devrait croître.
* David Moses est l’un des plus grands experts Canadiens en ingénierie des structures, construction massive, bois lamellé-collé et CLT, et un défenseur des avancées en matière de normes de l’industrie et d’ingénierie des structures. Ses nombreuses réalisations comprennent le premier bâtiment passif et le premier bâtiment en CLT du Canada ainsi que la rénovation de la Art Gallery of Ontario. Il est l’un des auteurs principaux du chapitre 13, Exemples de calculs, du Manuel canadien sur le CLT.