La construction en bois : un élément majeur de la décarbonisation de l’économie d’ici 2050

wood decarbonizing net-zero climate changePour atteindre les objectifs du plan contre les changements climatiques du Canada et arriver à la carboneutralité d’ici 2050, toutes les industries doivent mettre la main à la pâte. Le secteur du bâtiment est au troisième rang quant aux émissions de gaz à effet de serre (GES) (cette proportion ne représente actuellement que les émissions opérationnelles, mais des discussions sont en cours pour inclure les émissions des matériaux de construction et de leur production), ce qui signifie que réduire son empreinte carbone est essentiel pour atteindre les objectifs du Canada. La construction d’édifices multiétages en bois représente une belle occasion de réduire cette empreinte. « Les édifices en hauteur en bois peuvent jouer un grand rôle pour aider le Canada à réduire ses émissions de GES, car ils stockent le carbone et le séquestrent pendant de longues périodes; le bois remplace aussi des matériaux à plus forte empreinte carbone », explique Patrick Lavoie, chercheur principal en durabilité pour FPInnovations.

Analyse du cycle de vie

Pour savoir réellement si un édifice en bois est plus écoresponsable qu’un édifice fait d’un autre matériau, il faut faire une analyse du cycle de vie (ACV), un outil scientifique de gestion environnementale qui mesure l’impact d’un produit sur l’environnement. L’ACV considère l’ensemble du cycle de vie du produit, de l’extraction des matières premières à la production, au transport et à l’utilisation jusqu’à la fin de sa vie utile. « L’ACV est objective. Elle donne aux décideurs des données quantitatives et des possibilités d’améliorer la performance environnementale de chaque partie de la chaîne de production », ajoute M. Lavoie. « Elle évite aussi le transfert de charge environnementale, qui se produit quand la réduction de l’impact climatique d’un processus fait augmenter l’impact d’un autre processus. »

En construction, le calcul de l’ACV d’un édifice analyse et compare au moins deux édifices faits de différents matériaux pour comprendre l’empreinte environnementale de chacun par rapport à l’autre. Une ACV de bâtiments en bois de grande hauteur, réalisée par FPInnovations, a comparé l’édifice Arbora C en bois massif, situé à Montréal (Québec), à un bâtiment hypothétique équivalent fait de matériaux conventionnels. L’étude a révélé qu’un système de construction en bois massif pour un bâtiment de huit étages permettait de réduire les émissions de 20 % par rapport à l’édifice équivalent sur un cycle de vie de 60 ans, soit d’environ 1746 t d’équivalent CO2, ce qui correspond à retirer 377 voitures de la route par année. Cette étude, ainsi que d’autres effectuées par FPInnovations, conclut que le bois est une solution de rechange positive pour le climat comparativement à d’autres matériaux de construction non seulement parce que l’intensité de carbone de sa production est moins grande, mais aussi parce qu’il emprisonne, ou séquestre, le carbone pendant une longue période.

Une autre ACV sur la consommation énergétique nette nulle de FPInnovations a cherché à savoir si construire en bois pour réduire les émissions totales de GES d’un édifice serait plus profitable que simplement atteindre une efficacité énergétique nette nulle. Un bâtiment à consommation énergétique nette nulle est un bâtiment qui produit, par des technologies comme des panneaux solaires, autant d’énergie qu’il en consomme annuellement; sa consommation annuelle nette d’énergie est donc nulle. L’étude révèle que dans le contexte québécois, où l’énergie est générée par de l’hydroélectricité propre, on ne devrait pas mettre l’accent uniquement sur l’efficacité énergétique d’un bâtiment comme moyen de réduire les GES. Les matériaux utilisés dans la construction représentent en fait la majeure partie des émissions de GES sur la durée de vie du bâtiment. Le potentiel réel se trouve dans les façons de réduire l’empreinte carbone des matériaux de construction.

« Les études concluent que le bois est une solution de rechange positive pour le climat par rapport à d’autres matériaux de construction non seulement parce que l’intensité de carbone de sa production est moins grande, mais aussi parce qu’il emprisonne le carbone pendant une longue période. »

Les résultats paraissent bien sur papier, mais comment peut-on, collectivement, passer de la théorie à la pratique pour que l’industrie de la construction réduise les émissions de GES au Canada?

« Au fil des ans, FPInnovations a généré une mine de connaissances et d’expertise qui ont servi à bâtir un environnement réglementaire favorable à l’utilisation du bois comme matériau de construction plus propre et renouvelable dans les édifices en hauteur », affirme Denis Cormier, vice-président, Opérations de la recherche chez FPInnovations. « Nos chercheurs et techniciens sont passionnés et engagés à créer des solutions de nouvelle génération pour une industrie de la construction plus verte et une culture de la durabilité plus solide », ajoute-t-il. « Grâce à des partenariats avec les gouvernements fédéral et provinciaux ainsi qu’avec l’industrie, FPInnovations développe des solutions transformatrices pour optimiser l’utilisation du bois comme matériau durable. »

Qu’est-ce que ça signifie pour les entrepreneurs, les architectes et les promoteurs?

Cela signifie qu’une ACV à l’étape de la conception peut contribuer à réduire les émissions de carbone d’un bâtiment. Cela veut aussi dire concevoir et construire avec le bois, un matériau à coût concurrentiel, accessible (malgré les perturbations temporaires dues à la pandémie) et facile à travailler. Pour les structures à ossature légère en bois (jusqu’à 6 étages), la construction en bois est en réalité moins coûteuse. Pour les structures plus hautes, le bois est concurrentiel par rapport aux autres matériaux. L’accès au bois est également facile et rapide en raison de la présence de scieries et d’usines de bois d’ingénierie et de fabrication partout au Canada. L’aptitude au façonnage du bois en fait aussi un matériau pratique et sécuritaire pour le travail sur les chantiers.

Le principal aspect qui nuisait à la construction en bois était le manque de connaissances techniques, d’outils et de solutions faciles à appliquer pour les entrepreneurs, les architectes et les promoteurs. Dorénavant, grâce aux programmes de formation technique et universitaire, aux outils et saines pratiques offerts par des associations comme Cecobois et Wood Works! (en anglais) ainsi qu’aux solutions appliquées innovantes de FPInnovations et de ses partenaires, ces problèmes sont pratiquement disparus. Les codes du bâtiment ont aussi évolué et mettent dorénavant davantage l’accent sur la performance plutôt que sur les matériaux.

« Comme ingénieurs en structure, nous voulons offrir à nos clients des options de matériaux écoresponsables, car nous ne pouvons pas nous fier uniquement aux améliorations du chauffage, de la climatisation et de l’isolation. Il nous faut rapidement des matériaux à plus faible empreinte carbone si nous voulons atteindre les objectifs à court terme sur le plan du carbone. Le bois massif et la construction en bois nous donnent cette possibilité, contrairement à d’autres matériaux. Nous, les professionnels de la conception, dépendons des recherches et des données de FPInnovations pour expliquer aux propriétaires les avantages du bois en construction. »

David Moses, ingénieur et fondateur de Moses Structural Engineers Inc.

Pour aider les architectes et les promoteurs à surmonter certains des obstacles liés à la construction en bois, FPInnovations a publié plusieurs guides et manuels :

Atteindre les objectifs de carboneutralité du Canada nécessitera beaucoup de travail. FPInnovations poursuit ses études afin d’aider les décideurs à utiliser des données scientifiques pour évaluer le potentiel d’une économie circulaire et prendre des décisions judicieuses dans un contexte de complexité, d’incertitude et d’ambiguïté. L’organisation continue aussi sa collaboration avec des partenaires dans des projets de recherche appliquée et d’innovation afin de mettre au point des produits biosourcés écoresponsables à partir de sous-produits inutilisés du secteur des pâtes et papiers.

Construire en bois est un élément de la stratégie de croissance d’un secteur forestier durable qui peut aider l’industrie de la construction à réduire son empreinte carbone et aider le Canada à atteindre ses objectifs en matière de climat.

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